GASPARD GIRARD D'ALBISSIN: Un balcon en forêt
VERNISSAGE 13 MARS 2025 (18H-21H)
Gaspard Girard d’Albissin (1988, France) peint à partir d’images trouvées : photographies anonymes, scènes de mode, instantanées extirpées d’internet. Avec cette exposition l’artiste nous replonge dans un blog des années 2000 ou un album photo. Ces fragments (main couverte de bagues clinquantes, chemisier rose en satin, perruche domestique, paire de santiags) détachés de leur contexte d’origine, sont recadrés, saturés de lumière et minutieusement retravaillés. La lumière artificielle est centrale, elle accroche les matières jusqu’à l’irréel. Un balcon en forêt, c’est un refuge, un temps suspendu. Ce n’est pas l’événement qui compte, mais l’attente, la concentration, ce qui imprègne silencieusement la mémoire. Dans son atelier, Gaspard Girard d’Albissin recrée ce flottement : un espace à part, où la peinture devient un lieu de retrait et de contemplation.
Il y a, dans son approche, une tension entre la fixité du tableau et l’instantanéité des sources dont il s’empare. Collectionneur et sauveur d’images, il les collecte et transforme pour composer un atlas où le banal devient motif et où l’éphémère s’ancre dans la peinture. Il s’agit de jouer avec ce que les images racontent, avec ce qu’elles cachent et ce qui leur survit.
« Une mémorisation exaltée et arrêtée, contre laquelle le Temps lui-même ne prévaudra pas, c’est le sentiment immédiat que nous communique tout grand tableau, avec cet air hautain et envoûtant qu’il a […] d’entrer indéfiniment dans l’avenir à reculons : toute peinture, dans son essence, est rétrospective. »
Julien Gracq* insistait sur cette puissance propre à la peinture : une image qui, une fois couchée sur la toile, résiste au temps et à l’oubli, tout en gardant en elle la trace du moment où elle a été captée. Gaspard Girard d’Albissin fait exactement cela : il attrape des éclats d’un présent volatile et les ancre dans une peinture qui, même en gardant l’apparence du fugace (flashs, reflets, textures mouvantes), les transforme en images survivantes. Ces images prélevées auraient pu s’effacer dans le flux numérique, mais une fois transposées sur la toile, elles acquièrent une nouvelle présence : hantées par ce qu’elles étaient, distanciées par ce qu’elles deviennent.
*En lisant en écrivant, 1980